Page:Cicéron - Œuvres complètes - Panckoucke 1830, t.9.djvu/333

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de vos témoins, Ébutius, qui osa déclarer atteint et convaincu un citoyen, sans même savoir de quoi on l’accusait (53), n’oserait jamais décider qu’un époux a des droits sur la dot de sa femme, quand elle la lui a promise sans y être autorisée par personne. Ô science admirable ! combien, à ce titre, elle mérite, juges, que vous la conserviez !

XXVI. Qu’est-ce en effet que le droit civil ? Une règle qui ne saurait être éludée par le crédit, renversée par la puissance, altérée par l’or corrupteur. Supposez le droit, je ne dis pas détruit, mais seulement abandonné, négligé en quelqu’une de ses parties, il devient désormais impossible de compter ni sur ce qu’on doit recevoir de son père, ni sur ce qu’on doit laisser à ses enfans. Qu’importe de posséder une maison, un domaine provenant de l’héritage paternel ou acquis de quelque autre façon, si cette possession est incertaine, si elle ne nous est garantie par un droit de propriété, si ce droit n’est pas irrévocable, si la loi civile et publique ne peut le mettre à l’abri des atteintes de la puissance ? Que sert-il, dis-je, de posséder une terre, si les règles sagement établies par nos ancêtres, relativement aux bornes, aux possessions, aux eaux et aux chemins, peuvent, sous quelque prétexte, être changées, bouleversées ? Croyez-moi, chacun de vous, quant à la sûreté de ses biens, reçoit un plus bel héritage du droit et des lois que des personnes qui lui ont transmis ces biens mêmes. Je puis, en vertu d’un testament, devenir propriétaire d’un bien ; mais ce bien, devenu ma propriété, je ne puis le conserver sans l’appui du droit civil. Mon père m’a laissé un domaine ; mais c’est des lois, et non de lui, que je tiens ce droit de prescription, qui m’affranchit de toute inquiétude et de la crainte des