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Page:Cléri - Le Crime de la chambre noire, 1915.djvu/45

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Savanne se dirigea vers le château et s’arrêta à l’endroit, où apparaissait habituellement le Chasseur Rouge. Dauriac l’entendit qu’il modulait le cri lugubre de la chouette avec une telle science d’imitation, que l’oiseau de nuit ou le bandit lui-même s’y fussent mépris.

Par trois fois, il reproduisit le hululement funèbre qui s’éleva dans le silence de la nuit.

Les deux amis, l’un dans la lumière, l’autre dans l’ombre, attendaient impatiemment. La complice viendrait-elle ? N’avait-elle pas été prévenue déjà par le Chasseur Rouge ?

Tout à coup une silhouette féminine se découpa en noir sur le fond clair de l’allée baignée de lune. Elle approchait, elle venait au rendez-vous que lui fixait l’appel de la chouette.

Savanne étouffa un cri de triomphe quand il vit la femme à quelques pas de lui.

Il reconnut la sorcière. Elle portait des vêtements sombres et un capuchon rabattu sur les yeux.

Elle alla à Savanne.

— Bonsoir, mon bien aimé, lui, dit-elle. Je vous ai attendu hier…

Savanne eut un instinctif recul de surprise et d’effroi.

De même que lui-même était apparu à Dauriac sous la forme du Chasseur Rouge avec, sur les lèvres, la voix de Savanne, la femme qui était devant lui avait le corps de la sorcière et la voix de Madame Mauvin !

— Comment ! vous, Madame ! s’écria-t-il au comble de l’étonnement.

Ce fut au tour de Mme Mauvin de reculer. Elle venait de reconnaître M. Savanne sous le déguisement du Chasseur Rouge.

Elle balbutia des paroles incompréhensibles et perdit toute contenance. Un moment, on eut pu croire qu’elle allait tomber évanouie, mais elle parut se ressaisir par un effort de volonté.

— Comment, continuait Savanne, c’est vous Mme Mauvin ! c’est vous qui, sous le déguisement d’une pauvre femme sur laquelle vous cherchez sans doute à porter les soupçons, c’est vous qui fixiez des rendez-vous à un