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Page:Clairville - Les Deux Canailles, paru dans Le Caveau, 1871.djvu/3

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Certe un artiste, à l’état de bohême,
A bien le droit, amoureux indigent,
De s’endetter pour la belle qu’il aime…
On peut toujours emprunter de l’argent,
Mais pour le rendre, oh ! le rendre est urgent.
J’excuse encor, j’excuse un pauvre hère
Qui, malgré lui, reste insolvable, hélas !
Mais le fripon qui ne cherche ici-bas
Qu’à se moquer des dupes qu’il peut faire,
C’est la canaille, et moi, je n’en suis pas.

Gloire aux héros ! certe, en quatre-vingt-treize,
Beaucoup, pieds nus, couraient à l’ennemi ;
On les a vus, chantant la Marseillaise,
Vaincre à Fleurus, à Jemmape, à Valmy,
L’étranger seul de leur gloire a gémi.
Mais celui-là qui lit la Marseillaise
Et qui, séduit par ses alinéas,
Égorgerait peuples et potentats,
Pour être un jour un peu plus à son aise,
C’est la canaille, et moi, je n’en suis pas.

Enfin, Messieurs, cherchons à nous comprendre :
Oui, la canaille est partout sur nos pas,
Et nous n’avons qu’à monter ou descendre
Pour la trouver en haut tout comme en bas,