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Sensations de Nouvelle-France

chemin, puisque je me trouve soudain transporté en un pays d’Amérique où l’on se donne encore la peine d’aller puiser de l’eau au dehors de chez soi. Combien loin, en effet, ne suis-je pas par exemple, en ce moment, de ces mille et une ingéniosités savantes qui, dans les moindres bourgs du Massachusetts, ont aboli l’effort dans tous les actes de la vie domestique, et ont asservi la matière à nos moindres fantaisies.

Le train se remet en marche, et, des deux côtés, la plaine toujours rase et plate se déroule dans un lent mouvement d’éventail. Sur les prés déjà roussis par les premières gelées, les rayons du soleil courent en reflets diaprés. Parfois, au passage, frissonne un bouquet d’arbres, où, parmi les ramures sombres des sapins, éclatent les taches pourpre-sang des érables. Puis la plaine, interminablement plate et rase, reprend à nouveau, à peine tachetée çà et là de quelques maisons de ferme, écrasées au bord des routes. Soudain, à un tournant de la voie, très au loin, la flèche d’une église se dresse, d’une gracilité tenue dans cet air ouaté d’automne. L’église elle-même apparaît ensuite, affichant