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Sensations de Nouvelle-France

comme là-bas, c’est ce même premier aspect de neuf, de hâtif, avec çà et là la même extravagance de hauts édifices. Les rues, aussi, revêtent la même physionomie affairée, et les mêmes cars électriques y glissent dans une rapidité de rêve. Du reste, la frontière, qui sépare les deux pays, est purement illusoire, et, n’étaient certaines formalités puériles de douane, le touriste aurait peine à croire qu’il est passé en pays étranger. Même la monnaie — ce casse-tête du voyageur en Europe — se chiffre ici, comme aux États-Unis, en « dollars » et « cents ». Seulement, sur les pièces d’argent, l’effigie de la reine Victoria remplace la déesse de la liberté, et voilà tout.

Ce n’est qu’à la longue, et en rassemblant de multiples observations, que l’on finit par dégager la dominante de cette ville, dominante où se retrouvent, avec la « rage d’arriver » des yankees, le bel équilibre anglo-saxon, joint à la grâce et à l’urbanité française. En observant, par exemple, les voyageurs d’un car électrique, on s’aperçoit bien vite que les gens n’ont plus ici cette absence de regard, ou plutôt ce regard figé en dedans et comme reflué vers une pensée intérieure, que l’on rencontre si souvent aux États-Unis, surtout parmi les hommes. Le