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CAMILLE DESMOULINS ET LES DANTONISTES.

Stupides citoyens, ô lâches que nous sommes !
Un homme ose braver tant de milUons d’hommes.
Du front de l’artisan, du front du laboureur,
Il croit que pour lui seul doit couler la sueur ;
Que les peuples sont faits dans nos tristes contrées
Pour payer les hochets a d’augustes poupées ;
Et que tout doit souffrir, afin qu’à Trianon,
Nos maux fassent danser l’Autrichienne Toinon.
Claude, sur les Français règne, et de Messaline
L’âge accroît tous les jours la fureur utérine :
Et quoiqu’un milliard coule dans le trésor,
Claude pour ses amants demande un fleuve d’or :
Car tel est mon plaisir, dit-il. Dieux, quel langage !
Sommes-nous de vils serfs échus par héritage ?
Ah ! mon sang qui bouillonne à ces mots insolents,
M’avertit que je sors de ces antiques Francs
Qui, pour mettre leur septre (sic) en des mains plus habiles,
L’ôtoient aux fainéants, l’ôtoient aux imbéciles,
Et, maîtres d’obéir, ont du trône deux fois,
Car tel fut leur plaisir, fait descendre leurs rois.
Héritier d’Henri quatre et de Charles septième,
Est-ce donc à son fer qu’il doit le diadème ?
Croit-il parler en maître à des peuples conquis ?
Tout conquérant qu’il fût, même à ses Francs, Clovis,
S’il eût dicté pour loi sa volonté suprême,
La massue à leurs pieds l’eût étendu lui-même !
Apprends, mon cher Louis, mon gros benêt de roi.
Que tel est ton plaisir n’est pas telle est la loi :
Rends compte, et l’on veut bien encor payer ta dette :
Mais sois poli du moins quand tu fais une quête.
D’un gueux, dit Salomon, l’insolence déplaît.
Et c’est au mendiant à m’ôter son bonnet !