Page:Claretie - Jules Sandeau, 1883.djvu/28

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toire, dans son héroïsme, dans ses souvenirs, et voulut faire entendre sur la scène, après le grand mot de Devoir, le beau nom de Patrie.

Je me rappelle encore, au dénouement de Jean de Thommeray, la dernière pièce que Jules Sandeau ait signée avec M. Émile Augier, le saisissement qui nous prit lorsque, sur la scène de la Comédie-Française, nous vîmes apparaître, dans leurs poudreux uniformes de campagne, les mobiles de Bretagne, biniou en tête, avec le vieux comte de Thommeray pour les commander. Il y avait là un mot qui donnait le frisson, un de ces frissons d’enthousiasme et de foi qu’on trouve encore même dans la défaite, et l’âme des deux auteurs était si haute que nos espoirs en deuil pouvaient sans honte contempler ces vareuses en lambeaux. Le vieux M. de Thommeray faisait l’appel de ses hommes et lorsqu’il avait fini, un nouveau venu, l’héritier des Thommeray, enfant prodigue échappé à la maison bretonne et emporté par la vie de Paris, s’avançait tête nue et réclamait sa place au bataillon et sa part de danger.

« Qui êtes-vous ? disait le père.

— Un homme qui a mal vécu et qui a juré de bien mourir ! »