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Page:Claretie - La Vie moderne au théâtre, 2e série, 1875.djvu/314

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LA VIE MODERNE


M. Hector Malot s’est conservé, dans la littérature contemporaine, une place à part. A l’heure où les nécessités de la lutte quotidienne autant que les ardeurs des tempéraments entraînent la majorité d’entre nous de tous les côtés à la fois, il s’est volontairement contenté d’être et de demeurer romancier. Il n’a pas cru le roman étouffé par la politique ou distancé par le théâtre, et il a eu raison. M. Malot, d’ailleurs, tout eu y gardant sa place personnelle, est loin de s’être désintéressé du mouvement contemporain. Il n’est pas et n’a jamais été neutre. Son talent mâle et fort, où jamais la sobriété du fond n’est sacrifiée à l’éclat de la forme, a toujours été au service des idées politiques généreuses ou des idées scientifiques nouvelles. Aussi bien, en quatorze ans, de 1859, date de l’apparition de son premier roman, les Victimes d’amour, à 1873, où il vient d’achever une série d’études sur la dernière guerre et sur l’Empire, Un Blessé, Un Mariage sous le second empire, Hector Malot a conquis une autorité réelle dans ce genre particulier qui sera la forme particulière à notre temps, comme le pamphlet l’a été au dernier siècle, et le théâtre au temps de Louis XIV.

C’est, en effet, dans le roman que peuvent le mieux se faire jour les qualités d’analyse et ce besoin de tout disséquer, de tout étudier par le menu, qui font notre humeur moderne ; le roman se plie à toutes les combinaisons, à toutes les recherches. Il est purement amoureux si l’on veut, il devient satirique si on l’exige, philosophique pour peu qu’on y tienne. Le roman est le véritable genre qui convienne tout à fait à une littérature affranchie.

Mais, dans le roman, M. Hector Malot n*a eu garde de choisir le genre spécial des aventures, des récita « le cape et d’épée. Outre que ces sortes de contes ont vieilli, il s’est trouvé, pour en écrire, des maîtres difficiles a égaler. L’observation patiente et savante, l’étude de la lie moderne, ont attiré, tout d’abord, l’auteur des Victimes d’amour, qui n’a point dévoyé de son chemin et qui est constamment demeuré lidèle à son inspiration pre-