faire avant moi, sans autre effet que de se rendre importuns. Pourquoi serais-je plus heureux ?
… À Cesson, où l’on descend, pas d’omnibus. Mais, renseignement pris, j’en avais pour trois quarts d’heure à peine d’une marche facile à travers les bois. D’ailleurs, temps radieux !… Un soleil ! J’ai gardé le souvenir de ce soleil-là, le premier qui ait lui sur ma route.
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…Aux premières maisons du village, deux paysannes, qui s’en allaient leurs paniers sur la tête, me saluèrent comme une connaissance. Plus loin, un gros chien, étendu près d’une fontaine, vint amicalement me lécher la main. Un enfant m’indiqua la demeure de Déjazet. Cette grille là-bas, sur la place… Et Dieu sait avec quels battements de cœur je sonnai ! Personne ne vint, et je m’aperçus que la grille n’était pas fermée. Tout semblait s’ouvrir devant moi, comme au coup de baguette d’une fée. Une servante à tête blonde me cria de loin en souriant (elle aussi) :
— Entrez dans le salon, je vais prévenir Madame qui est au jardin.
J’entrai dans ce salon, que l’émotion ne m’empêcha pas de regarder très curieusement. Cette maison, je le savais, avait appartenu jadis à Bosio, puis à la marquise de la Corte, et, à la place d’honneur, un grand tableau représentait l’Amour sous les traits de Jules Janin ! J’examinai ce bon mobilier de l’empire, ces fauteuils en velours d’Utrecht et les tasses jaunes sur les guéridons à galeries de cuivre, quand une porte s’ouvrit derrière moi. Je me dis : « C’est elle ! » Et ramassant tout mon courage pour lui débiter le petit discours préparé sur la route, je me retournai. Je vis que c’était Elle en effet, et je demeurai coi, la bouche ouverte et muet comme un poisson.
Elle avait les mains pleines de plâtre, c’est là ce qui me désorientait. Je ne m’étais pas attendu à cela. Elle vit ma stupeur et me dit en riant :