Page:Claude Farrère - Les civilisés, 1905.djvu/199

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— « J’aime mieux M. Rochet, dit-elle tout à coup en riant d’un air bizarre.

— Le vieux journaliste ? Vous êtes folle ! » fit Sélysette scandalisée.

Elles s’assirent sur le banc de pierre.

— « Sélysette, que pensez-vous de M. de Fierce ?

— Mais rien de particulier. Il est charmant, très délicat et bon camarade. Vous savez tout cela comme moi.

— Il vous plaît ?

— Marthe, pourquoi me taquinez-vous ? Je vous assure qu’il n’y a rien entre nous, absolument rien…

— Vous êtes un amour de petite fille, » affirma Mlle Abel ; et elle prit les mains de Sélysette pour les serrer dans les siennes, ce qui était pour sa coutumière froideur une manifestation sympathique extraordinaire.

« Je suis sûre, — elle appuyait, — sûre qu’il n’y a rien. Mais dites quand même : il vous plaît ?

— Pourquoi non ?

— Vous l’aimez ?

— Que vous êtes absurde ! »

Mlle Sylva se levait, presque colère.

— « Ne vous fâchez pas, implora Marthe. Je vous jure, Sélysette, que je ne veux pas, pas du tout vous faire de la peine. Au contraire…

— Je sais bien, » murmura Sélysette apaisée.

— Écoutez, reprit Marthe. Vous êtes jeune, jeune et si gentille que je vous aime beaucoup. Nous parlions du docteur Mévil tout à l’heure. Il est très ami de M. de Fierce…