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XVIII

Quinze jours plus tard, le gouverneur général, près de partir pour Hanoï en tournée de printemps, donna le dernier grand bal de l’hiver. Tout Saïgon fut prié et quoique le palais du vice-roi d’Indo-Chine soit vaste, il fallut illuminer le parc, et cacher un orchestre parmi les arbres.

Les invités commencèrent d’arriver à dix heures. Ils étaient reçus par les officiers d’ordonnance et par la maison civile. Mme Abel, qui tenait le premier rang à Saïgon, — le gouverneur étant célibataire, — s’occupait des femmes, et tâchait que tout fût pour le mieux.

Le gouverneur, — ancien parlementaire très radical, — excellait aux représentations pompeuses. Il fit son entrée à onze heures, et ses lanciers tonkinois marchèrent devant lui dans le parc avec des torches. Il allait seul, faisant parmi ses hôtes une promenade de souverain. Les épaules nues se pliaient en révérences de cour, les smokings blancs cassaient en