Page:Claudel - Le Pain dur, 1918.djvu/153

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et tes yeux sont déjà ailleurs ! Ah, c’est moi tout de même qui suis le maître !
SICHEL — Crois-tu que je n’aie pas vu ce qu’il y a dans les tiens. Il est arrivé quelque chose depuis l’autre jour et tes yeux ne sont plus les mêmes.
LOUIS — Il n’est rien arrivé.
SICHEL, bas et passant la langue sur ses lèvres. — N’est-ce pas ? tu as tué ton père ?
LOUIS — Je n’ai pas tué mon père.
SICHEL — Je ne te demande rien. Je n’ai besoin de rien savoir. Mais ces yeux ne sont point ceux d’un homme qui a l’esprit en paix.
LOUIS — Il n’y a pas besoin ni d’esprit ni de paix.
SICHEL — Ah, si tu ne souffres pas la paix, tu n’en trouveras pas mieux que moi pour t’en guérir ! Non, il n’y a pas besoin de paix ! Ce serait trop commode pour ces cadavres qui nous entourent et qui ne nous empêcheront pas éternellement de vivre !