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claudine à l’école

qu’il n’est que 6 heures, que j’avais mal vu. Ça ne les ennuie pas tant que j’avais espéré.

À 7 heures moins le quart, Mlle Sergent nous bouscule, presse le chocolat, nous engage à jeter un coup d’œil sur nos résumés d’histoire tout en mangeant nos tartines, nous pousse dans la rue ensoleillée tout étourdies, Luce munie de ses manchettes crayonnées, Marie de son tube de papier roulé, Anaïs de son atlas minuscule. Elles s’accrochent à ces petites planches de salut, plus encore qu’hier, car il faudra parler aujourd’hui, parler à ces messieurs qu’on ne connaît pas, parler devant trente paires de petites oreilles malveillantes. Seule Anaïs fait bonne contenance ; elle ignore l’intimidation.

Dans la cour délabrée, les candidates sont aujourd’hui bien moins nombreuses ; il en est tant resté en route, entre l’écrit et l’oral ! (Bon, ça quand on en reçoit beaucoup à l’écrit, on en refuse beaucoup à l’oral). La plupart, pâlottes, bâillent nerveusement, et se plaignent, comme Marie Belhomme, d’avoir l’estomac serré… le fâcheux trac !

La porte s’ouvre sur les hommes noirs ; nous les suivons silencieusement jusque dans la salle du haut, aujourd’hui débarrassée de toutes ses chaises ; aux quatre coins, derrière des tables noires, ou qui le furent, un examinateur s’assied, grave, presque lugubre. Tandis que nous considérons cette mise en scène, curieuses et craintives, massées à l’entrée, gênées de la grande distance à franchir,