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claudine à l’école

des diables. Nous descendons en retard ; on nous gronde ; Mlle Sergent me demande : « Qu’est-ce que vous pouviez bien faire là-haut ? — Mademoiselle, nous mettions en tas des livres pour les descendre. » Et je pose devant elle, ostensiblement, la pile de livres, avec l’audacieuse Aphrodite et les numéros du Journal Amusant pliés dessus, l’image en dehors. Elle voit tout de suite ; ses joues rouges deviennent plus rouges, mais, vite raccrochée, elle explique : « Ah ! ce sont les livres de l’instituteur que vous avez descendus, tout est si mêlé dans ce grenier commun, je les lui rendrai. » Et la semonce s’arrête là ; pas la moindre punition pour nous deux. En sortant, je pousse le coude d’Anaïs dont les yeux minces sont plissés de rire :

— Hein, il a bon dos, l’instituteur !

— Tu penses, Claudine, comme il doit collectionner des « bêtises[1] » cet innocent ! S’il ne croit pas que les enfants naissent dans les choux, c’est tout juste.

Car l’instituteur est un veuf triste, incolore, on sait à peine s’il existe, il ne quitte sa classe que pour s’enfermer dans sa chambre.

Je prends le vendredi suivant, ma deuxième leçon avec Mlle Aimée Lanthenay. Je lui demande :

  1. Saletés dans le patois d’ici. Exemple : Si l’on va au bois des Fredonnes, le soir, on peut y rencontrer les gars et les « gobettes » y faire leurs bêtises.