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claudine à l’école

c’est enrageant ; faut-il qu’elle soit sûre de son triomphe pour se montrer si bonne !

Elle part, et toutes éclatent en rumeurs. Marie Belhomme n’en revient pas :

— C’est égal, vrai, nous faire donner des leçons par un jeune homme, c’est un peu fort ! Mais ça sera amusant tout de même, crois-tu, Claudine ?

— Oui. Faut bien se distraire un peu.

— Ça ne va pas t’intimider, toi, de nous donner des leçons de chant avec le sous-maître ?

— Tu n’imagines pas ce que ça m’est égal.

Je n’écoute pas beaucoup et j’attends, en trépignant à l’intérieur, parce que Mlle Aimée Lanthenay ne vient pas tout de suite. La grande Anaïs, ravie, ricane, et serre les côtes comme si le rire la tordait, et houspille Marie Belhomme, qui gémit sans savoir se défendre : « Hein ! tu vas faire la conquête du bel Antonin Rabastens : il ne résistera pas longtemps à tes mains fines et longues, à tes mains de sage-femme, à ta taille mince, à tes yeux éloquents ; hein ! ma chère, voilà une histoire qui finira par un mariage ! » Elle s’excite et danse devant Marie qu’elle a acculée dans un coin et qui cache ses malheureuses mains en criant à l’inconvenance.

Aimée n’arrive toujours pas ! Énervée, je ne tiens pas en place et vais rôder jusqu’à la porte de l’escalier qui conduit aux chambres « provisoires » (toujours !) des institutrices. Ah ! j’ai bien fait de venir voir ! En haut, sur le palier, Mlle Lanthenay