Aller au contenu

Page:Clausewitz - Théorie de la grande guerre, I.djvu/390

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
379
chap. xv. — base d’opérations.

tière, il ne peut plus en être ainsi dès que l’on met le pied sur le territoire ennemi, et la base d’opérations, très étendue jusqu’alors, se restreint aussitôt à la surface seule sur laquelle on est désormais en mesure d’assurer l’arrivage et le rassemblement des objets d’approvisionnement. Lorsqu’au début de la campagne de 1812 l’armée russe se retirait devant l’armée française, la première de ces armées pouvait avec d’autant plus de raison considérer la Russie entière comme sa base d’opérations, que les grandes dimensions de cet empire n’auraient assigné aucune limite à la retraite des Russes, quelque direction qu’ils eussent voulu donner à leur mouvement rétrograde. Bien que cette manière de voir fut parfaitement logique, elle ne reçut cependant que plus tard son application, alors seulement que, parties de points différents, plusieurs armées russes marchèrent sur l’armée française. Nous voyons, néanmoins, qu’au courant de la campagne cette base d’opérations n’a pas toujours conservé d’aussi vastes proportions, et que la plupart du temps au contraire, elle s’est trouvée restreinte au seul nombre de routes par lesquelles arrivaient ou s’en retournaient les immenses charrois que nécessitait l’approvisionnement des troupes. Ce fut précisément cette restriction forcée de sa base d’opérations qui contraignit l’armée russe, lorsque après avoir combattu trois jours durant à Smolensk elle dut continuer sa retraite un moment interrompue, et prendre de nouveau la direction de Moscou au lieu de se reporter par exemple sur Kalouga, comme on l’avait d’abord projeté dans l’intention de détourner les Français du chemin de la capitale. Un changement si subit de direction n’eût été possible qu’au seul cas où on en eût longtemps d’avance préparé l’exécution.

Nous avons dit, au début de ce chapitre, que la