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chap. viii. — procédés de résistance.

des détachements ni par des efforts précédents. Par contre, lorsque Wellington, immobile dans la position retranchée de Torres-Vedras, attendit que la misère, le froid et la faim contraignissent l’armée de Masséna à se mettre en retraite, les armes du défenseur n’eurent aucune part à l’affaiblissement effectif de l’attaquant.

Dans d’autres circonstances les deux modes de solution se trouvent réunis de maintes façons différentes dans l’action défensive ; mais néanmoins l’un des deux prédomine toujours.

Il en fut ainsi en 1812 en Russie. Il s’est présenté dans cette campagne célèbre des combats à la fois si nombreux et si meurtriers, que dans d’autres circonstances cela suffirait à faire attribuer la solution au mode de réaction défensive basé sur l’emploi exclusif des forces armées. Néanmoins on ne trouve dans aucune campagne un exemple aussi frappant de l’épuisement où les propres efforts de l’attaque la peuvent conduire. Des 300 000 hommes qui formaient le centre de l’armée française, il n’en arriva que 90 000 à Moscou ; or, comme on n’en détacha qu’environ 13 000, la perte totale monta à 197 000 hommes, et l’on ne peut vraiment attribuer aux combats que le tiers de cette perte.

Toutes les campagnes qui se distinguent par ce qu’on nomme la temporisation, telles par exemple que celles du célèbre Fabius Cunctator, sont particulièrement calculées sur la destruction de l’ennemi par ses propres efforts. Il en est un grand nombre cependant où, bien que ce principe ait joué le rôle principal, l’histoire n’en fait nullement mention, et dans lesquelles ce n’est en somme qu’en scrutant profondément les événements et en évitant de se rendre aux raisons factices imaginées par les historiens, que l’on en arrive à découvrir cette cause véritable d’un grand nombre de solutions.

Nous croyons avoir ainsi suffisamment développé les