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Page:Clausewitz - Théorie de la grande guerre, III.djvu/228

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chap. ix. — renversement de l’ennemi.

1o Chacun des généraux en chef doit tendre avant tout à livrer sa bataille générale dans des rapports de forces et dans des conditions qui lui permettent d’en tirer une victoire décisive. Il faut tout sacrifier à ce résultat et, par conséquent, ne distraire de ses forces que ce qui est strictement indispensable aux sièges, aux blocus, aux garnisons, etc., etc. On marcherait infailliblement à la défaite si, comme fit Schwarzenberg en 1814, aussitôt la frontière ennemie franchie, on se divisait pour suivre des directions divergentes. C’est à la faiblesse seule où la France en était arrivée en 1814 que les Alliés durent de n’avoir pas été écrasés dans les quinze premiers jours. Pour réussir, l’attaque doit être lancée droit au but comme une flèche, mais, dès qu’elle cherche à s’étendre, elle crève comme un ballon trop gonflé.

2o Il faut abandonner la Suisse à ses propres forces. Si elle reste neutre, le Rhin supérieur constituera un bon point d’appui pour les coalisés ; si au contraire les Français l’attaquent, elle est en état de se défendre elle-même, et, sous plus d’un rapport, c’est un rôle qui lui convient parfaitement. Ce serait une folie de déduire, de ce que la Suisse est la contrée la plus élevée de l’Europe, que sa situation géographique lui donne une influence prépondérante sur les événements de la guerre. Une contrée ne prend une pareille importance que dans des conditions très exceptionnelles qui ne se présentent pas ici. Attaqués au cœur même de leur pays, les Français seraient hors d’état de se porter eux-mêmes, par la Suisse, à l’attaque énergique de l’Italie ou de la Souabe, attaque à laquelle l’élévation de la contrée ne prêterait d’ailleurs aucun appui décisif. L’avantage à tirer stratégiquement d’une position dominante est surtout marqué dans la défensive, mais, dans l’offensive, il ne s’étend pas au delà du premier

iii. 15