Page:Clausewitz - Théorie de la grande guerre, IV.djvu/150

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
134
de la théorie de la guerre.

celles que nous avons déjà énumérées et qui, ainsi exaltées par le sentiment d’hostilité et par le danger, sont tout à fait dans leur milieu à la guerre, — il n’en est pas une qui n’y trouve fréquemment aussi l’espace nécessaire à son développement. Il va sans dire qu’il est une quantité de petites passions mesquines que le sérieux de la situation réduit au silence dans un pareil milieu, mais le fait ne se produit cependant que dans les grades inférieurs de la hiérarchie militaire, dans lesquels, incessamment entraîné d’un effort ou d’un danger à l’autre, l’homme fait sans arrière-pensée le sacrifice de sa personne, perd de vue tous les autres intérêts de la vie, et, méprisant le mensonge, parce qu’il se sent toujours en présence de la mort, en arrive à cette droiture de caractère qui fait si grand honneur à la carrière des armes. Dans les hautes régions du commandement, le phénomène est tout différent, car plus le grade s’élève et plus la personnalité de celui qui l’occupe prend d’autorité, jusqu’à ce que, enfin, les intérêts surgissant de toute part, l’envie et la générosité des sentiments, la suffisance et la modestie, la violence et la douceur de caractère, toutes les passions bonnes et mauvaises, en un mot, apparaissent comme de véritables puissances morales dans le grand drame de la guerre.


Nature de l’esprit.


La nature de l’esprit exerce autant d’influence que celle du caractère sur la direction à la guerre. On comprend bien, en effet, que d’une intelligence froide et puissante, on puisse et doive attendre autre chose que d’une tête fantasque, exaltée et légère.