l’énorme distance qui sépare le vraie génie de la science acquise, en arrivèrent ainsi à refuser toute croyance à la théorie, et à considérer la conduite de la guerre comme une fonction naturelle que l’homme remplit plus ou moins bien, selon qu’il apporte en naissant plus ou moins d’aptitudes à ce propos. Bien que cette opinion se rapproche plus de la vérité que celle qui n’accorde de valeur qu’au savoir seul, elle a cependant le caractère de l’exagération. Il est certain qu’il n’est pas d’activité que l’esprit de l’homme puisse remplir s’il ne dispose d’une certaine richesse d’idées ; mais ces idées, pour la plupart du moins, ne naissent pas spontanément en lui ; il les lui faut acquérir, et elles constituent alors son savoir. Il ne s’agit donc plus que de reconnaître de quelle nature ces idées doivent être, selon l’activité que l’esprit a à remplir. Or, nous croyons l’avoir déjà précisé, pour l’activité militaire, elles doivent tendre vers les objets qui ont directement rapport à la guerre.
Dans le champ même de l’activité guerrière, le savoir nécessaire est en raison de l’élévation du grade, c’est-à-dire que, dirigé vers des objets restreints et d’importance secondaire lorsque la position est inférieure, il doit gagner en puissance et en développement à mesure qu’elle s’élève. Il n’est pas rare de voir des généraux en chef distingués, qui n’ont rien fait de brillant quand ils commandaient un régiment, et, réciproquement, des colonels remarquables, qui ne dépassent pas la médiocrité lorsqu’ils arrivent aux grades supérieurs.