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Page:Cleland - La Fille de joie (éd. 1786).djvu/120

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avions fruſtré l’Egliſe de ſes droits, ce qui ne lui déplut pas, eu égard aux deſſeins qu’elle avoit ſur moi : infâmes deſſeins, hélas ! qu’elle ne trouva que trop tôt occaſion d’exécuter.

Je vivois depuis onze mois avec cette chere idole de mon ame, & j’étois groſſe de trois, lorſque le coup funeſte & inattendu de notre ſéparation arriva. Je paſſerai rapidement ſur ces particularités, dont le ſeul ſouvenir me fait friſſonner & me glace le ſang.

J’avois déja langui deux jours, ou plûtôt une éternité, ſans entendre de ſes nouvelles, moi, qui ne reſpirois, qui n’exiſtois qu’en lui, & qui n’avois jamais paſſé vingt-quatre heures ſans le voir. Le troiſieme jour mon impatience & mes allarmes augmenterent à un tel degré, que je n’y pus tenir plus long-tems. Je me jettai aux genoux de Madame Jones, la ſuppliant d’avoir pitié de moi, & de me ſauver la vie, en tâchant au plutôt