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Page:Cleland - La Fille de joie (éd. 1786).djvu/305

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Je perdis donc ma chere abbeſſe avec un regret infini : car, outre qu’elle ne rançonnoit jamais ſes chalands, elle ne pilloit non plus en aucune façon ſes écolieres, & ne débauchoit jamais de jeunes perſonnes, ſe contentant de prendre celles que le ſort avoit réduites au métier, dont, à la vérité, elle ne choiſiſſoit que celles qui pouvoient lui convenir, & qu’elle préſervoit ſoigneuſement de la miſere & des maladies où la vie publique mene pour l’ordinaire.

A la ſéparation de Madame Cole, je louai une petite maiſon à Marybone, que je meublai modeſtement, mais avec propreté, où je vivotois à mon aiſe des huit cents livres que j’avois épargnées.

Là je vécus ſous le nom d’une jeune femme dont le mari étoit en mer. Je m’étois d’ailleurs miſe ſur un ton de décence & de diſcrétion, qui me permettoit de jouir ou d’épargner ſelon que mes idées en diſpoſeroient : maniere de