Page:Cleland - La Fille de joie (éd. 1786).djvu/73

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échapper, en cet inſtant, un profond ſoupir, qui n’étoit rien moins qu’occaſionné par la douleur. Le héros pouſſe, elle répond en cadence à ſes mouvemens ; mais bientôt leurs tranſports réciproques augmentent à un tel degré de violence, qu’ils n’obſervent plus aucune meſure. Leurs ſecouſſes étoient trop rapides & trop vives, leurs baiſers trop ardens pour que la nature y pût ſuffire : ils étoient confondus, anéantis l’un dans l’autre. “ Ah ! ah !… je n’y ſaurois tenir… c’en eſt trop… j’évanouis… j’expire… je meurs „. C’étoient les expreſſions entrecoupées qu’ils lâchoient mutuellement dans cette douce agonie. Le champion, en un mot, faiſant ſes derniers efforts, annonça par une langueur ſubite répandue dans tous ſes membres, qu’il touchoit au plus délicieux moment. La tendre Polly annonça qu’elle y touchoit auſſi, en jetant ſes bras avec fureur, & perdant l’uſage de ſes ſens dans l’excès du plaiſir.