Page:Cleland - Mémoires de Fanny Hill, femme de plaisir, 1914.djvu/45

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« — Eh bien ! milord, dit Charlotte, comment puis-je vous aider dans cette affaire ?

« — Je vous dirai, répliqua-t-il, qu’à ma connaissance, mon rival a une liaison criminelle avec ma femme. Procurez-moi donc, pour demain soir, une personne qui ait grandement cette maladie, afin que je sois complètement en état de me venger de l’infidélité de ma femme et de la bonne fortune de mon rival.

« — Dieux ! s’écria Charlotte, qui s’imaginait qu’il voulait l’insulter et jeter du discrédit sur sa maison. Vous m’étonnez, milord, et me traitez bien mal, moi qui ai toujours pris le plus grand soin de votre santé. Je ne connais point et ne reçois point chez moi de cette espèce. »

« Il était temps pour milord d’en venir à une explication plus particulière ; pour la convaincre de la vérité, il tira de sa poche son portefeuille et lui présenta un billet de banque de trente livres sterling. Cette espèce d’avocat fit sur Charlotte son effet ordinaire : elle l’écouta avec plus d’attention, et promit de lui procurer un objet conforme à ses souhaits. Le lendemain, la consommation heureuse s’ensuivit, et, au bout de quinze jours, le mari injurié fut convaincu que la double inoculation avait eu tout l’effet qu’il en avait désiré. Quelque temps après, l’associé de son lit parut en public ; milord lui demanda le prix de sa gageure, qu’il paya immédiatement afin de ne pas entrer en discussion sur cette affaire.

« Nous voyons dans quelle variété de services Charlotte était obligée de s’engager ; elle était nécessitée de produire des vierges qui, depuis longtemps ne l’étaient plus ; des femelles disposées à satisfaire de toutes les manières possibles le caprice imaginaire de la chair ; des maîtres de poste pour les dames, capables de donner les leçons les plus sensibles à la garantie d’une minute près.