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DÉMOSTHÈNE

d’avoir compris, d’avoir voulu, d’avoir fait. Grandes leçons souvent perdues. Il était plus aisé d’acclamer l’orateur que de se vouer invinciblement aux redoutables fragilités de la plus noble cause. Sauvée, la patrie hellénique, en gestation du plus haut idéal d’humanité pensante, eût peut-être affranchi notre histoire de siècles de misères où la culture humaine a failli succomber. Pouvait-on vivre, pouvait-on mourir pour une plus belle destinée ? N’en eût-il subsisté que la noblesse de l’entreprise, l’Hellénisme pouvait-il léguer à sa patrie une plus magnifique renommée ?

Dans le domaine de l’idée, Athènes aura été le grand habitacle de la civilisation, comme le sentit fortement Démosthène au cours de sa lutte contre une barbarie superficiellement policée. Mais Athènes, cité d’idéalisme, ne pouvait triompher des foules hétérogènes que par les concentrations d’une patrie hellénique à faire vivre dans ses réalités. Une noire idéologie d’ignorance s’est plu à proclamer, dans notre Europe incohérente, que la nature ne connaît pas de patrie. C’est purement prétendre que la nature produit des organismes sans ambiance et que la cellule, par exemple, peut se passer de plasma. Dans la série des complexités organiques croissantes, la famille constitue le milieu immédiat de l’individu comme la patrie le milieu agrandi où évolue l’homme gré-