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II

DANS LES DÉFILÉS DE LA CONNAISSANCE

Au départ.

Franchir le pas de la sensation à la connaissance ! J’ai essayé de dire dans quelles conditions le phénomène avait pu s’accomplir. Pour quels résultats ?

Conscientes ou inconscientes, il y a, de toutes parts en nous, des réactions de « sensibilité ». Au contact de ma main, un fil de fer réagit électriquement, tandis que je réagis en sensations, résolues en images dont les associations et dissociations formeront l’état organique dit de connaissance, par une correspondance obtenue d’un moment de l’évolution humaine à un passage de l’évolution universelle.

Ainsi, connaître, ce sera pénétrer, par les chemins de la sensation, dans les rapports des choses, dans des moments de rapports, c’est-à-dire dans un enchaînement de phénomènes mouvants selon des correspondances de synchronisme du Cosmos avec nos réactions de sensibilité. Ceci à des degrés divers, tout au long de la série animale, jusqu’à des synthèses de connaissances et d’émotivités humaines dont les évolutions poursuivront leur cours vers des achèvements d’inconnu. L’émotion, élan de tout l’être au delà des réalités sensibles, devancera l’observation attentive et pourra même l’égarer, non sans avoir, cependant, porté l’homme trop haut pour qu’il renonce jamais à s’en désintéresser. Si la course à l’idéal nous apporte souvent le spectacle du plus beau départ, il n’y a point toujours encombrement de magnificences à l’arrivée. Mais la beauté subsiste en nous d’avoir voulu, d’avoir tenté.