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AU SOIR DE LA PENSÉE

historiques, il ne s’en trouve pas une où se puisse accrocher la plus légère amorce d’une discussion d’expérience. Aucune partie n’en peut être retenue, même au prix d’une interprétation forcée. Les Védas, l’Avesta, la Chaldée, l’Égypte, Israël, n’ont rien à nous dire de « l’origine » des choses, qui ne soit en contradiction de tous les phénomènes observés. Il n’en saurait être autrement, puisqu’il ne faut pas moins que tous les grands échafaudages d’expérience pour que le problème puisse être abordé. Jadis, comme aujourd’hui, comme toujours, il s’agissait de déterminer la condition de l’homme dans le monde à connaître, pour en induire des règles d’accommodation. Les méconnaissances de la réponse primitive, toujours dogmatiquement maintenue, entraînent des conséquences sous le poids desquelles la plus haute humanité se débat encore dans les conflits du cauchemar divin et de la connaissance positive qui nous achemine au réveil.

Aussi bien, notre Dieu, qui n’est que le Jahveh des juifs christianisé par saint Paul, s’obstine-t-il à nous vouloir maintenir sous son autorité, dans toutes les manifestations de notre vie. C’est que nos modestes gains d’observation destinés à la conquête universelle des intelligences, sont d’une source étrangère à ses livres sacrés. S’il peut arriver à la connaissance positive de défaillir sous l’obsession du rêve primitif, comment s’étonner des mécomptes où nous laisse la bruyante superbe des conquêtes d’imagination ? Arrêtons-nous d’abord aux spectacles des phénomènes d’où jaillirent si tard les premiers tâtonnements d’interprétations positives. Du point de vue général, il se comprend assez que la cosmogonie fasse la cosmologie qui n’en est que la continuation

Des cosmogonies aux cosmologies.

Nous n’avons que faire ici de l’histoire des innombrables conceptions de l’univers où l’esprit humain s’est égaré[1]. Il suffit d’évoquer le souvenir des principaux paliers de l’esprit humain

  1. Cf. l’ouvrage de M. Pierre Duhem.