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au soir de la pensée

les développements du système nerveux, des vues géniales confirmées par les observations modernes. Nous y ajoutons seulement que les tropismes élémentaires pourraient n’être rien de plus, rien de moins, que des aspects mouvants de l’universelle gravité. J’ai répété que Newton lui-même ne donnait point le mot d’attraction pour le nœud du Cosmos — se contentant de dire que les choses se passent « comme s’il y avait attraction ». Les tropismes, dénommés selon les énergies qui les mettent en œuvre, ne feraient que nous représenter un stage des activités élémentaires de l’évolution cosmique, sans commencement ni fin. L’explosion atomique serait tropisme par excellence. Sous la domination, incessamment manifestée des tropismes, nous serions les produits éphémères du changement éternel que notre folie s’acharnerait à vouloir fixer.

Le mode d’action des tropismes ne peut être révélé que par une immense enquête d’expériences sur le vif, qui n’en est qu’à son début. Les méprises d’aujourd’hui pourraient être plutôt d’inférences trop promptes que d’ignorance caractérisée. Lamarck avait jeté la sonde aux bons endroits. Les travaux de la présente génération ont remarquablement mis en valeur ses merveilleuses préparations.

Feuilletez quelques-unes des publications sur la matière, et admirez ce qu’il a fallu dépenser de patiente ingéniosité dans les détours du plus ingrat labeur, pour arriver aux premiers rayons de lumière[1]. De toutes parts nous continuerons de nous heurter au problème des problèmes matière-énergie, pour remonter des premières individuations minérales — évolutions de complexes physico-chimiques — aux individuations progressives de sensibilités organiques dont le fonctionnement produira les animations de tous degrés. Quelle pauvre figure fait l’indéterminable absolu de la métaphysique, devant les incomparables prodiges de ce timide aspect de relativités !

  1. Consulter la Parthénogenèse naturelle et expérimentale, Delage et Goldsmith.