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au soir de la pensée

phénomènes de sensibilité ordonnée dits de psychisme — incompréhensibles pour qui n’en a pas suivi la filiation.

C’est à Lamarck lui-même que j’emprunte cette ébauche d’indications qui permettent d’orienter le lecteur dans les incertitudes d’un premier rayon de clarté[1]. Il n’en faut pas davantage pour montrer que le phénomène biologique et le phénomène psychologique, qui y est impliqué, ne font qu’un dans l’ensemble des activités organiques subjectivement compartimentées. On aurait pu le soupçonner par la faillite séculaire des plus éminents psychologues qui se sont acharnés à aborder le problème au rebours.

L’irritabilité de l’organisme élémentaire suit si promptement la réaction physico-chimique qu’on a parfois beaucoup de peine à l’en distinguer. Mais dès qu’elle s’élève à des différenciations de sensibilité, nous voyons les sensations coordonnées réagir en des phénomènes d’un psychisme caractérisé. De ce point de vue, M. Georges Bohn répartit le monde animal en trois séries distinctes : le premier groupe sera des infusoires, polypes, astéries, vers, etc., dont les réactions sont voisines du monde végétal. Irritabilité diffuse à la lumière, à la gravitation, à l’humidité, à l’aération… Plus tard, une sensibilité de précision supérieure spécialisera les sensations, comme on le verra nettement dans les articulés et les vertébrés formant le deuxième et le troisième groupes, que leurs différenciations affranchissent peu à peu du milieu d’où ils sont issus. Le crustacé et l’insecte ont leurs organes isolés de l’ambiance, par leur carapace de chitine dont on retrouve la trace dans le poisson ganoïde, vertébré. Chez les vertébrés, les organes de soutien (cartilages et os du squelette) laissent les viscères à l’extérieur,

    résumatives de l’organisme encéphalo-rachidien lui assurent une puissance de coordination qui détermine la direction des activités.

  1. Du point de vue de l’action du milieu, Lamarck propose la classification suivante :

    1o Animaux n’ayant aucun système nerveux. — Infusoires, par exemple.

    2o Animaux dont le système nerveux, sans ganglions, ne peut déterminer que des contractions musculaires. — Échinodermes.

    3o Animaux auxquels le système nerveux ganglionnaire permet des mouvements et des sentiments. — Articulés, mollusques.

    4o Les vertébrés, qui sont dans les conditions précédentes, possèdent l’intelligence.