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culeuse » que l’hypothétique guérison d’un malade aux piscines sacrées. Camper sur ses deux pieds cet être, au-dessus de tous autres par les mouvements de sa connaissance et de ses émotivités, pour en faire le porte-pensées du Cosmos et le mettre à l’œuvre incomparable d’exprimer des parties du monde afin d’en tirer une aide pour les accommodations de sa vie, est une entreprise ou chacun a le droit de broncher. Comment s’y reconnaître ?

Aussitôt que le passage de l’anthropoïde au pithécanthrope nous aura conduits au spectacle de l’homme debout, qui renonce, sans retour, à la forêt de ses aïeux pour fouler en conquérant les vallées et les plaines, y installer l’abri d’une demeure, aussitôt que de sa dramatique confrontation avec le monde commenceront de sortir les premières interrogations et les premières réponses, le phénomène des phénomènes, l’entrée en scène de l’homme pensant sera définitivement inauguré. Le grand dialogue va donc s’instituer de l’homme avec lui-même, pour des enchaînements de sensations, de pensées et de toutes activités corrélatives qui constitueront la trame de nouveaux passages à des accroissements nouveaux. Les transmissions héréditaires des caractères acquis et, par là, d’une puissance évolutive en voie de développements, ne connaissant point de relâche, l’homme se complétera, s’achèvera, sans cesse, en des rencontres d’inconscience et de conscience mêlées. Pour quels effets d’avenir ?

C’est à ce moment que la paléontologie comparée, après avoir reconstitué la généalogie de l’homme, pièces fossiles en main, pour lui ouvrir les champs d’une évolution continue, le livre à la proto-histoire avec les primitifs aèdes, plus tard accompagnée de l’annaliste hasardeux qui sera peut-être un érudit timoré, peut-être un observateur inattentif, un imaginatif, un poète, peut-être un scribe consciencieux, capable seulement d’aligner des légendes de toutes provenances, sans traces d’esprit critique, en attendant que vienne l’heure du « penseur » digne de « penser ».

De ce point de vue, tous livres sacrés, d’interprétations imaginatives, seront les sources capitales de la préhistoire, à la seule condition qu’on veuille bien les tenir pour ce qu’ils sont : les consignations des premiers sursauts d’émotivités humaines au spectacle des mouvements cosmiques dont il nous importe dès le premier jour, de découvrir les rapports pour nous y