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au soir de la pensée

positif relativement très lourd, formé du reste de l’atome. L’atome n’est donc pas insécable au sens strict du mot, et peut-être consiste en une sorte de soleil positif, noyau de charge fixée, autour duquel circule un essaim de planètes négatives, identiques pour tous les atomes. »

L’atome éclaté ayant promu ses éclats au rang d’atomes nouveaux, nous pouvons mesurer leur vitesse énorme, ainsi que le rapport de leur charge électrique à leur masse, puisqu’ils sont chargés d’électricité négative pour l’électron, positive pour le noyau. Nous aurions ainsi atteint simultanément «  l’extrême répartition de la matière et de l’énergie ». L’électron serait « un atome d’électricité. »[1]. « On ne peut, continue M. Jean Perrin, considérer un électron indépendamment de la charge négative qu’il transporte. Il est inséparable de cette charge, il est constitué par cette charge. » Ce qui veut dire, si je comprends bien, que matière et énergie ne se peuvent considérer séparément que pour se distribuer en des correspondances de quantités. Nous touchons à la théorie des quanta qui, avec ses grains d’électricité, ses grains de lumière, serait ainsi, jusqu’à nouvel ordre, la formule peut-être ultime de l’individuation.

Pour ce qui est du comment ces « charges » sont chargées dans l’atome, et comment elles en sont déchargées, c’est ce qu’on ne nous dit pas. Et je n’en éprouve point de surprise puisque ce n’est rien de moins que la question, à peu près insondable, des ultimes rapports de la matière et de l’énergie. Le mot « charge » est une métaphore destinée à l’expression d’un passage de phénoménologie que nous ne connaissons pas.

En somme, la structure atomique de l’électricité peut être regardée comme acquise. De même la lumière est corpusculaire, tout en demeurant d’ondulations. « Ces grains de lumière, ces projectiles de lumière dénommés photons, nous dit M. jean Perrin, pourraient, comme les atomes d’électricité, transmettre leur énergie à la matière. »[2] Et M. Langevin rapprochera les deux termes de plus près encore en nous démontrant que la lumière est pe-

  1. La molécule d’un gaz ionisé, c’est-à-dire devenu conducteur d’un courant électrique, est supposée dissociée en deux parties positive et négative, qui sont les ions et les électrons.
  2. Nous voilà bien près de l’identification de la matière et de l’énergie.