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Page:Clemenceau - Grandeurs et misères d'une victoire, 1930.pdf/182

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grandeurs et misères d’une victoire

parmi les ravageurs de notre territoire en 1870 et en 1914, contre leurs frères celtes du pays français. Ils se sont mal battus pour défendre leur propre indépendance qui a sombré à Sadowa dans la paix de Bismarck. Pour s’asservir ils n’ont rien épargné. Leur ambition d’aujourd’hui est de se prussianiser, à la manière de ce qui reste de l’Autriche qui demande l’Anschluss pour la gloire des coups de bâton de Berlin. Les Rhénans, j’en conviens, ont mieux résisté. Ils accusent une souffrance de la lourde main prussienne. Notre enfantillage est de croire trop vite que leur incomplète prussianisation les dispose à devenir Français.

A l’heure, cependant, où les soldats de la Révolution française bousculaient l’envahisseur germanique en appelant les peuples aux réalisations universelles des droits de l’homme, des hommes du Rhin se trouvaient, comme en d’autres pays, pour acclamer la France et s’offrir en conquête morale aux décrets de justice et de liberté. Le 13 novembre 1793, Georges Forster, Mayençais, dans un discours au club républicain de Mayence, nous offrait le Rhin pour frontière française. Et la Convention nationale rhéno-germanique nous envoyait des délégués pour s’offrir à l’incorporation française.

Mais, depuis ces jours, que de changements dans les deux pays ! Napoléon a promené dans l’Europe le drapeau de la Révolution française, mais avec des dispositions de conquérant qui imposait sa volonté par la force des armes. Depuis ces jours, Sadowa et Sedan ont puissamment soudé les articulations de l’Allemagne. De Mirabeau à Napoléon, nous-mêmes nous avons