Page:Cobb - Le peuple des torrents, 1936.djvu/11

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

LE PEUPLE DES TORRENTS 9

Vous ne voudriez pas, tout de même, que moi, le fiancé d’Alma Chapuis, j’ai tué son frère ! Mais il vit, autour de lui, tous les visages fermés et les regards sans sympathie. Marchant droit au prêtre, il répéta d’une voix forte :

— Vous m’entendrez en confession quand il vous plaira, monsieur le Curé. En attendant, je vous jure devant mes camarades et devant Dieu qui est toujours partout que je ne suis pour rien dans la mort d’Egide Chapuis !


CHAPITRE II

Nasaire le fou


En vain la femme de Nazaire Roberval, la bonne Marie,’ avait essayé de le décider à manger et de le faire se coucher. Il restait assis au coin de l’àtre, ramassé sur lui-même comme un fauve, les yeux fous. La malheureuse le regardait avec terreur, n’osant le quitter et souhaitant un secours qui n’arrivait pas. Aussi, quand on frappa à la porte, se précipita-t-elle pour aller ouvrir et poussa-t-elle un soupir de soulagement en se trouvant en face de l’abbé Gagnon que tout le monde aimait dans le village :

— Ah ! Monsieur le Curé, venez à mon aide ! Mon pauvre mari... On dirait qu’il ne me voit ni ne m’entend. ..

Il lui fit signe de se taire et, d’un air naturel, s’avança vers l’homme, lui posa la main sur l’épaule :

— Eh bien ! Nazaire, mon garçon ? Bonne chasse, cette année ?

Le regard du Canadien ne quittait pas le mur ; il