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Page:Coignet - Aux Vieux de la vieille, 1853.djvu/409

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de fortune plus que moi, il n’avait droit de me réclamer aucune pension ; je croyais avoir réussi et n’en fus pas moins condamné, avec mon frère, à servir à mon père deux cent quarante francs de rente viagère, payables trois mois à l’avance. Je me sentis comme foudroyé en entendant la sentence des juges.

Je revins peu gai, et pas du tout satisfait, chez mon avoué. Eh bien ! lui dis-je, vous m’avez donné un mauvais conseil ; car j’ai eu pour me juger celui qui me demandait mon cheval à emprunter, et si je l’avais laissé lui faire manger des javelles, peut-être n’aurais-je pas perdu mon procès. Mon père ne tarda pas à nous signifier le jugement. En voilà, m’écriai-je, de fortes sangsues que l’on applique à ma bourse : puis quatre-vingts francs en sus pour quatre feuilles de papier timbré, enregistrement compris ; c’est bien cher. Mais il faut dire aussi que l’écriture était d’une finesse à ne pouvoir pas en lire un mot. Allez donc plaider. Oh ! le mauvais métier ; depuis cette lecon-là, je me ferais plutôt arracher les deux oreilles que de rentrer dans les procès ; aussi ai-je été bien guéri de cette manie là, car depuis je n’ai jamais plaidé. J’ai fait quelques pertes dans mon petit commerce, mais je n’ai voulu assigner aucun de mes débiteurs : je me rappelais trop bien les sangsues du palais de justice.

J’empruntai quarante francs pour solder les frais de ma dernière affaire. La pauvre demi-solde ne suffisait plus, il fallut se serrer le ventre encore davantage. Je