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DU CAPITAINE COIGNET.

à la tête de la première pièce, et tout le monde à son poste. Nous eûmes le signal du départ ; il ne fallait pas souffler. Nous passâmes sans être aperçus.

Arrivés de l’autre côté, ou tourne à gauche tout court ; en longeant le chemin de quarante pas, on se trouve garanti par le rocher qui tend la tête sur le chemin et qui masque le fort. Nous trouvâmes les chevaux tout prêts ; ils furent de suite attelés et partis. Nous revînmes par le même chemin sur la pointe du pied, à la queue au loup[1], mais ils nous entendirent et nous lancèrent des grenades par-dessus le rempart. Comme elles tombaient de l’autre côté du chemin, nous ne fûmes pas atteints, personne ; nous en fûmes quittes pour la peur, et nous revînmes prendre nos fusils. On fit là une faute ; il fallait mettre nos fusils sur les caissons, et nous faire continuer notre chemin ; on nous a exposés, mais on ne pense pas à tout.

En arrivant de notre pénible corvée, le colonel nous fit compliment de notre bon succès. « Je vous croyais perdus, mes braves. » Notre capitaine nous fit former le cercle autour de lui, et nous dit : « Mes grenadiers, vous venez de remplir une belle mission. C’est une bonne épreuve pour la compagnie ! » Il nous serra la main à tous, et me dit : « Je suis content de vo-

  1. Un à un, en se tenant l’un à l’autre par le pan de l’habit.