Page:Coignet - Les Cahiers du capitaine Coignet, 1883.djvu/358

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tête de vos régiments. Les grenadiers nous attendent. Pas une minute à perdre ! Au trot à mon commandement, et au galop dès qu’on sera à portée de fusil ! Les grenadiers enfonceront les barrières. »

Les cuirassiers longèrent le bois, et fondirent sur les redoutes à l’opposé du front d’attaque pendant que les grenadiers arrivaient aux barrières. Cuirassiers et grenadiers français luttèrent pêle-mêle avec les Russes. Le brave Caulaincourt tomba raide mort près de moi. Je me rattachai au vieux colonel qui avait le commandement, et ne le perdis pas de vue. La charge terminée et les redoutes en notre pouvoir, le vieux colonel me dit : « Partez, dites à l’Empereur que la victoire est à nous. Je vais lui envoyer l’état-major pris dans les redoutes. »

Tous les efforts des Russes se portaient au secours de ces redoutes, mais le maréchal Ney les foudroyait sur leur droite. Parti au galop et traversant le champ de bataille, je voyais les boulets labourer le champ de bataille, et je ne croyais pas en sortir. Mettant pied à terre en arrivant près de l’Empereur et ôtant la mentonnière qui retenait mon chapeau, je vois qu’il lui manque la corne de derrière : « Eh bien, me dit-il, tu l’as échappé belle. — Je ne m’en suis pas aperçu ; là-bas, les redoutes sont prises, le général Caulaincourt est mort. — Quelle perte ! — On va vous amener beaucoup d’officiers. »