Page:Coignet - Les Cahiers du capitaine Coignet, 1883.djvu/378

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côté et s’emparaient de leur feu ; ces malheureux gisaient sur la neige. Il faut avoir vu ces horreurs pour le croire.

Je peux certifier que la déroute de Moscou tenait plus de 40 lieues de route, sans sacs ni fusils. C’est à Vilna que nous éprouvâmes le plus de souffrances ; le temps était si rigoureux que les hommes ne pouvaient plus le supporter ; les corbeaux gelaient.

Dans ce temps rigoureux, je fus envoyé près du général chargé de la conduite des trophées de Moscou pour les faire renverser dans un lac à droite de notre route. En même temps on livra le trésor aux traînards ; ces malheureux se jetèrent dessus et enfoncèrent les barriques ; les trois quarts gelèrent près de leur pillage. Leurs fardeaux étaient si lourds, qu’ils tombèrent. J’eus toutes les peines du monde à rejoindre mon poste ; je le dois à mon cheval déferré qui ne glissait pas. Je suis certain que l’homme dans l’état de faiblesse où il se trouvait n’était pas capable de porter 500 francs. Moi je possédais 700 francs d’économies dans mon portemanteau ; mon cheval se couchait tant il était faible. Je m’en aperçus, et prenant le sac, je vais trouver mes vieux grognards dans leur bivac et leur propose de me débarrasser de mes 700 francs. « Donnez-moi 20 francs d’or, je vais vous donner 25 francs. » Tous s’en firent un plaisir, et je fus débarrassé, car je les aurais laissés sur