Page:Colet - Enfances celebres, 1868.djvu/36

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LA COMTESSE. Mais vous, nourrice, vous le justifiez toujours.

RACHEL. Madame… c’est que…

LA COMTESSE. Enfin, où est-il ?

RACHEL. Madame, il chasse à coups de cailloux les hirondelles nichées dans les mâchicoulis du château.

OLIVIER, se levant et s’approchant d’une fenêtre. Voyons si c’est vrai… Oh ! le voici qui rentre, il a le visage en sang, les habits déchirés.

JEAN, s’approchant à son tour de la fenêtre. Il est plus laid vraiment qu’un bohémien.

LA COMTESSE. Ah ! quel enfant ! je n’en aurai jamais que du chagrin !

BERTRAND, entrant. J’en ai mis trois par terre. J’ai faim : à manger.

LA COMTESSE. Non, vous ne mangerez pas, et vous serez au pain et à l’eau. Vous êtes la honte de la famille, méchant, sans esprit… sans…

BERTRAND. Moi, ma mère ? je suis fort.

LA COMTESSE. Le chapelain se plaint de vous ; vous ne savez pas lire encore.

BERTRAND. Dois-je me faire moine, pour passer mon temps sur des parchemins ? Est-ce avec une plume qu’on peut pourchasser les Anglais ?

RACHEL. Voyez, maîtresse, quelle forte pensée s’agite déjà dans cette jeune tête.

LA COMTESSE. Non, non, Rachel, il n’y a rien de bon en lui ; il oublie la noblesse de son sang ; il se mêle à des serfs.

BERTRAND. Les Anglais sont nos serfs aussi, et, si je bats aujourd’hui les petits vilains, cela me donne l’espérance