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SCÈNE III.
Dans la campagne.


STELLA et FILIPPO menant les troupeaux.


STELLA. Mais comment fais-tu, mon frère, pour inventer d’aussi jolies choses avec tes doigts ?

FILIPPO. Je n’en sais rien, Stella ; je ne comprends pas ce qui me donne le pouvoir de retracer tout ce que je vois, comme l’eau retrace notre visage quand nous y regardons ; mais je suis poussé par un désir invincible à toujours reproduire les images qui sont devant moi, soit avec la pointe de mon couteau sur la pierre, soit avec un charbon sur les murs, ou bien avec le bout de mon bâton sur le sable. Oh ! si je pouvais avoir une de ces grandes feuilles de papier blanc sur lesquelles écrit notre curé, il me semble que je ferais une madone comme celle qui est debout sur le maître autel de notre église.

STELLA. Elle semble vivante, cette madone ; on dirait qu’elle marche, qu’elle va parler.

FILIPPO. Elle te ressemble un peu, ma petite Stella. Mais nous voici arrivés à la lisière du bois. Garde le troupeau, moi je vais chercher une de ces pierres molles où mon couteau s’enfonce facilement ; puis je reviendrai dessiner ton portrait.

STELLA. Tu désobéis à notre père, Filippo ; ne t’a-t-il pas dit de ne t’occuper que de nos bestiaux ?

FILIPPO. Ne seras-tu pas contente, ma petite sœur,