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sente ici mon tuteur ; que puis-je faire ? qu’exigez-vous de moi ?

               C’est le cœur, c’est l’esprit, c’est l’âme qu’il me faut !

reprit Nérine d’une voix lamentable.

— Ils sont à vous, répliqua l’écolier, vos ennemis n’entraînent que le corps !…

— Je le leur abandonne, s’écria Nérine avec un geste superbe.

Un éclat de rire universel se fit entendre à ces mots auxquels la laideur de l’écolier donnait une signification si bouffonne.

Le malheureux eut des larmes dans les yeux.

— Assez ! assez ! dit-il avec l’accent de la prière, je sais bien que je suis hideux !

Le jeu de Nérine s’arrêta net ; devant l’ironie qui blessait, elle reculait toujours. Elle tendit la main à l’écolier :

— Monsieur de Chaly, lui dit-elle, vous êtes un enfant, mais vous êtes bon, et je n’ai pas voulu vous blesser.

Il sortit en chancelant ; les pans de sa redingote battaient les murs ; je remarquai que ce soir-là il n’avait pas changé d’habits.

On riait encore tandis qu’il s’éloignait.