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périeurs et cultivés soient seuls capables de ces sensations idéales ; les cœurs tendres les éprouvent aussi ; de là quelques tressaillements et quelques acclamations dans les foules, toujours justes et toujours éclairées, par intuition, en face d’un spectacle produit par l’art ou par une nature grandiose. On peut être inculte mais inspiré ; c’est-à-dire propre à s’assimiler ce qui est grand et beau. Mais les demi-esprits médiocres, rétrécis par les petits intérêts ou les vanités puériles, s’enferment et se murent dans le cercle de leur éducation ou de leurs habitudes de castes.

Ces réflexions me vinrent tout naturellement, il y a quelques années, pendant une saison d’eaux que je passais aux Pyrénées ; le hasard groupa sous mes yeux une curieuse scène, petit tableau burlesque dont le cadre incommensurable de ces montagnes faisait mieux ressortir les proportions mesquines.

On était aux derniers jours d’août ; les Eaux Bonnes, qui durant trois mois avaient vu affluer les malades et les oisifs de toutes les capitales du monde, ne gardaient plus que quelques rares buveurs s’obstinant à attendre leur guérison de la naïade bienfaisante.

Des Anglais et des paysagistes, qui ne faisaient que passer, venaient grossir parfois ce groupe retar-