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Lorsque nous entrâmes, Nérine et moi, dans la salle à manger à l’heure du déjeuner, nous y trouvâmes le burlesque écolier qui avait accompagné ses parents et ne nous avait point attendues selon son habitude.

J’ai dit que sa place à table était à côté du bel Italien, il s’en éloigna pour faire honneur à son cousin et à sa cousine ; le marquis Sigismond s’assit auprès de l’écolier, et la jeune marquise Aglaé entre son mari et le pâle Milanais. Nérine et moi nous nous trouvâmes ainsi placées en face du couple aristocratique ; j’avais à ma droite M. Routier et sa femme, les opulents fabricants de Mulhouse, qui venaient de se faire présenter par l’écolier au marquis et à la marquise ; les deux maris avaient échangé quelques paroles de profession de foi politique ; les deux femmes quelques mots sur l’empressement qu’elles auraient à se lier.

Quand nous fûmes tous assis, j’examinai le marquis et la marquise. Lui, ainsi que je l’ai dit, avait les traits beaux ; mais ses yeux ternes et sans expression, sa bouche dure et sensuelle, ses cheveux déjà appauvris en faisaient un être dépourvu de charme ; sa taille, qui avait été fort noble, s’épaississait et se voûtait légèrement ; il avait le geste brusque et la parole tranchante.