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Page:Colet - Lui, 1880.djvu/174

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— Oh ! comme je l’aimais !

Malgré tous, heureux et charmés, peu soucieux du reste du monde, nous partîmes un soir en chaise de poste. Quand nous eûmes franchi la barrière de Paris j’embrassai ardemment Antonia, en lui disant :

— Enfin, te voilà toute à moi ! Quel voyage enchanteur nous allons faire sans témoins, vraiment libres, confondus l’un à l’autre et nous enivrant des délices de la vie dans ce pays du soleil, de la poésie et de l’amour ! Ce sera comme un renouvellement de notre tendresse ! Vois-tu cette claire étoile qui se lève en face de nous ? c’est l’espoir de notre bel avenir.

En parlant ainsi, je riais, j’enlaçais sa petite main dans la mienne ; je chantai quelque refrain joyeux, et je stimulai le postillon en lui criant : « Plus vite ! plus vite ! »

On fait bien de fêter l’espérance : elle est la plus belle part du bonheur. Sitôt qu’elle se transforme en réalité, elle perd de son charme et de son infini et nous heurte toujours par quelque côté.

Nous arrivâmes sans fatigue à Marseille, prenant gaiement les incidents de la route et y trouvant sans cesse pâture à notre curiosité et à notre enjouement. Nous louâmes la plus belle cabine d’un bateau qui partait pour Gênes, et nous voilà lancés sur la Méditerranée ! La première heure de traversée fut un éblouissement. Assis l’un près de l’autre sur le pont, nous regardions l’immensité des flots bleus, arrondis comme d’énormes turquoises où le soleil radieux