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Page:Colet - Lui, 1880.djvu/259

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les corbeilles ciselées des surtouts. La galerie retentissait d’une longue rumeur de propos joyeux, de mots provoquants, et de paroles d’amour prononcées dans cette suave langue italienne, « doux idiome bâtard du latin, a dit Byron, qui coule des lèvres d’une femme comme des baisers, et résonne comme si on l’écrivait sur du satin ; dans les syllabes de cette langue semble courir l’haleine de l’heureux climat du midi[1]. »

Qui donc eût résisté à l’atmosphère énervante qui nous enveloppait ? Nous étions tous, hommes et femmes, ivres ou enivrés ; les nymphes et les faunes peints sur le plafond dans des postures lascives semblaient se mouvoir pour venir à nous.

Au dessert, Zéphira fit donner le signal à tous les orchestres qui jouèrent à la fois une valse étourdissante.

— À moi, me dit-elle d’une voix impérieuse et m’enlaçant étroitement, elle m’entraîna dans la danse véloce ; elle avait tout à fait rejeté sa robe de nonne ; je me sentais pressé contre sa gorge nue et contre la peau de tigre de sa tunique qui parfois bondissait jusqu’à mon visage. Mon cerveau était en délire, je ne savais plus si c’était Zéphira ou Négra qui m’emportait ; les mille tournoiements de la valse nous avaient conduits jusqu’à une serre qu’éclairait à peine une lumière voilée ; éperdus, haletants, nous allâmes nous affaisser sur une ottomane qu’abritaient des arbustes en fleurs.

  1. Lord Byron, Beppo.