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Page:Colet - Lui, 1880.djvu/380

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puis il prit avec une sorte de brusquerie mon bras sous le sien, en me disant : « Sortons vite. » Nous trouvâmes près du théâtre le coupé qui nous attendait ; mais à peine y fus-je assise, à côté d’Albert, que son aspect étrange me rendit toute tremblante. Ses yeux brillaient comme des escarboucles sur son visage empourpré, il saisit mes bras, sans me parler, avec ses mains amaigries, qui m’enchaînèrent comme deux menottes de fer.

— Albert ! cher Albert ! qu’avez-vous ? murmurai-je en sentant ma terreur grandir.

— J’ai, répondit-il d’une voix sourde et sinistre, que c’est assez de tourments ; vous n’avez mis cette robe que pour me tenter ; et aussitôt me heurtant de sa tête, il essaya de déchirer avec ses dents la mousseline qui me couvrait.

— Par pitié, lui dis-je, laissez-moi, vous me faites peur !

— Eh bien ! ayez peur, qu’importe ; j’ai assez souffert, je ne veux plus souffrir. Il ne fallait pas vous vêtir comme celles qui nous provoquent et qui ont plus d’honnêteté et de bonté dans leur laisser-aller que vous dans vos réticences ; allons, allons, ma belle, le lion a rugi, il faut vous soumettre !

Je me demandais s’il devenait fou ou s’il était en état d’ivresse.

— Albert ! m’écriais-je impérieusement, je vous jure que si vous ne revenez pas à vous, je m’élance à l’instant de la voiture, au risque de me tuer.