Nous nous rendons au Musée. Il renferme de magnifiques Rembrandt, et entre autres sa fameuse Ronde de nuit ; c’est la toile la plus grande et la plus estimée du célèbre coloriste. La lumière et les ombres semblent se jeter un défi dans ce tableau magique ; ce n’est point ici le sujet même du tableau qui préoccupe, mais son coloris merveilleux. La manière dont chaque tête est éclairée est un miracle de peinture. Rembrandt avait, comme Rubens, la lumière intérieure ; il la répandait sur ses tableaux avec les savantes et patientes combinaisons qui caractérisent son génie.
Le tableau des Cinq Régents, du même maître, vaut presque la Ronde de nuit. Le sujet en est simple : quatre hommes de grandeur naturelle, et vêtus de noir, sont assis autour d’une table couverte d’un tapis rouge. Sur cette table est posé un registre. Le cinquième personnage a quitté son siége et semble parler aux autres, qui le regardent attentivement. Un serviteur est placé derrière l’orateur : on comprend qu’il attend ses ordres. Quelle vigueur et quelle science consommée dans la manière dont ces figures sont rendues ! Les chairs, les cheveux, les étoffes, tout est en relief, tout frémit ; de très-près on comprend, si l’on est du métier et en étudiant les touches du maître, de quels procédés il usait pour fondre les ombres et la lumière ; mais à quelques pas c’est la nature, la na-