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Page:Colette - La Paix chez les bêtes, 1916.djvu/24

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LA PAIX CHEZ LES BÊTES

bien de griffes ? je ne sais pas. Cent mille, peut-être. J’ai une queue plantée de travers, maigre, mobile, impérieuse, expressive, — pour tout dire, diabolique.

« Je suis le diable, et non un simple chat. Je ne grandis pas. L’écureuil, dans sa cage ronde, est plus gros que moi. Je mange comme quatre, comme six, — je n’engraisse pas.

« J’ai surgi, en mai, de la lande fleurie d’œillets sauvages et d’orchis mordorés. J’ai paru au jour, sous l’apparence bénigne d’un chaton de deux mois. Bonnes gens ! vous m’avez recueilli, sans savoir que vous hébergiez le dernier démon de cette Bretagne ensorcelée. « Gnome », « Poulpiquet », « Kornigaret », « Korrigan », c’est ainsi qu’il fallait me nommer, et non « Poum » ! Cependant, j’accepte pour mien ce nom parmi les hommes, parce qu’il me sied.

« Poum ! » le temps d’une explosion, et