Page:Colette - La maison de Claudine, 1922.djvu/34

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Il fait frais et triste, sur le perron où j’attends le retour de ma mère. Son petit pas élégant sonne enfin dans la rue de la Roche et je m’étonne de me sentir si contente… Elle tourne le coin de la rue, elle descend vers moi. L’Infâme-Patasson — le chien — la précède, et elle se hâte.

— Laisse-moi, chérie, si je ne donne pas l’épaule de mouton tout de suite à Henriette pour la mettre au feu, nous mangerons de la semelle de bottes… Où est ton père ?

Je la suis, vaguement choquée, pour la première fois qu’elle s’inquiète de papa. Puisqu’elle l’a quitté il y a une demi-heure et qu’il ne sort presque jamais… Elle le sait bien, où est mon père… Ce qui pressait davantage, c’était de me dire, par exemple : « Minet-Chéri, tu es pâlotte… Minet-Chéri, qu’est-ce que tu as ? »

Sans répondre, je la regarde jeter loin d’elle son chapeau de jardin, d’un geste jeune qui découvre des cheveux gris et un visage au frais coloris, mais marqué ici et là de plis