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JOSEPH CHAUVITEAU À SON FILS SALABERT

Providence, 8 avril 1798.

Salabert, mon cher enfant, celle-ci : vous sera remise par votre frère, qui va vous rejoindre. Je vous remets, mon cher Salabert, l’autorité de père ; n’en mésusez pas. Cet enfant est singulièrement bon, sensible ; ne le brusquez pas. Vous ferez de lui ce que vous voudrez ; surtout, montrez-lui l’exemple. L’un et l’autre, soyez d’honnêtes gens ; avec de la patience, vous deviendrez riches. Votre grande union avec votre frère augmentera la considération que l’on a pour vous ; il vous devra son bonheur. Qu’il est doux, mon fils, pour un cœur sensible, de faire le bonheur d’une personne, et surtout d’un frère ! Vous ferez ce que j’aurais dû faire ; vous payerez ma dette auprès de cet enfant, après moi, ce que votre frère aîné aurait dû faire. Je vous parle encore de ma position ici ; si la guerre vient, j’ai une autre inquiétude. Votre mère est dans un âge critique ; je crains qu’un hiver de plus ne l’emporte. Enfin, mon fils, vous devez me connaître ; puissiez-vous deviner toutes mes peines, mes chagrins et mes craintes !

Adieu, mon fils, ménagez votre santé et celle de votre frère ; donnez-nous de vos nouvelles le plus souvent possible. Profitez de la première occasion pour me dire l’arrivée de votre frère auprès de vous. Ne manquez pas de nous dire ce que vous aurez pu faire pour lui. Je suis bien sûr que vous partagerez avec lui vos petites ressources. Vous nous deviendrez, s’il était possible, plus cher à votre mère et à moi. Oui, votre mère est au désespoir du départ de son dernier enfant.

Adieu, Salabert ; adieu, mes enfants.