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la Gazette des étrangers (1895), la Liberté chrétienne (1898), enfin le Bulletin technique de la Suisse romande (1902).

Une société pour le développement de Lausanne s’est constituée en 1885. C’est à son initiative que l’on doit la création des bains de Cour, le lac à patiner et le parc aux daims, dans le bois de Sauvabelin ; elle a contribué financièrement pour une somme de 25 000 francs à la construction du quai d’Ouchy ; elle a participé encore à d’autres œuvres d’utilité publique ; elle s’est donné pour but de faire connaître Lausanne à l’étranger ; elle a organisé et elle entretient un bureau de renseignements. D’autres sociétés de développement, au nombre de sept, se sont constituées dans divers quartiers.

Les cafés, qui jouaient autrefois un grand rôle dans la vie lausannoise, semblent avoir perdu de leur importance, les gens ayant moins de loisirs qu’autrefois.

En 1895, on comptait à Lausanne un café pour 190 habitants ; aujourd’hui on ne compte plus qu’un café pour 230 habitants. Cela tient au fait que le Conseil d’État et la Municipalité se sont mis d’accord pour accorder le moins possible de nouvelles patentes.

Vers 1840 s’était fondé, dans la maison Manuel à la rue de Bourg, le Café français tenu par Pomaret. L'idée du tenancier était de faire de son établissement un café de bon ton, que les dames pussent fréquenter sans scrupules ; il ne vendait au début que du café, des limonades et des sirops. Mais ce régime doucereux ne réussit pas. Comme les temps ont changé ! Aujourd’hui, il existe à Lausanne plusieurs cafés-chocolats, et des tea-rooms élégants et prospères. Il est vrai qu’il y a aujourd’hui dans notre ville beaucoup d’étrangers oisifs, de jeunes pensionnaires friandes et de dames que tentent les afternoon-tea savoureux.

Deux cafés, naguère prospères, ont périclité et se sont fermés : ce sont d’une part le café Rodieux, sur la place de Saint-François, qui était en son temps le rendez-vous journalier des membres en évidence du parti radical, et de l’autre, le café Morand, fondé en 1825, à la rue de Bourg, où se concentrait l’état major du parti libéral. A l’occasion de la fermeture de ce dernier, en 1891, il a paru dans la Gazette de Lausanne[1] un article dû à la plume de M. Albert Bonnard, dont nous extrayons les renseignements suivants, qui font revivre une page curieuse du vieux Lausanne :

« Le papa Morand » ou « l’oncle », comme l’appelaient les étudiants, était un homme avisé, un hôte modèle, aimable, sans familiarité déplacée. Il considérait ses clients comme des invités, il avait appris de Brillat-Savarin que « convier quelqu’un c’est se charger de son bonheur pendant tout le temps qu’il est sous votre toit. » Son Madère, son Bourgogne, son Aigle, son Yvorne, étaient parfaits ; sa cuisine opulente, mais son triomphe, c’étaient les glaces, elles étaient exquises. Alexandre Dumas père, qui se piquait d’être cuisinier, en avait tâté un jour, et il écrit dans ses Impressions de voyage[2] : « Elles coûtent trois bâches (neuf sous de France), et ce sont les meilleures que j’aie mangées de ma vie. Je les recommande à tout voyageur qui passe à Lausanne. » Il y avait devant la porte du

  1. Numéro du 3 février 1891.
  2. Tome Ier, page 59.